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Ju-Jitsu
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Reportages

  (Magazine «Samurai», Milano - Interview par Claudio Regoli - Trad. de l’italien)

Nihon Butokukai JuJitsu

Rencontre avec Stefano Surace

Vient d’Italie mais vit en France le dernier maître de la «méthode suprême»

J’avais lu et entendu parler longtemps de ce «maître de l’ombre» qui dans le souterrain d’une église des hauts quartiers de Paris enseignait du JuJitsu à un petit nombre d’élèves. Le premier à en parler avait été Salvini, un historien connu des arts martiaux qui l’avait «découvert» le premier et fait connaître au public.

Ce à quoi je ne m’attendais pas, en le rencontrant dans un des plus élégants locaux de Paris, où très gentiment il m’avait donné rendez-vous, c’était qu’il s’agissait précisément de «ce» Surace, journaliste célèbre du genre qu’aux Etats-Unis on appelle «investigating reporter», auteur d’enquêtes qui firent du bruit et qui lui attirèrent des attaques physiques dont il avait toujours su se tirer d’affaire.

L’histoire que maître Surace m’a racontée est fascinante. Elle débute avec son père fonctionnaire de la Gil (soit Jeunesse italienne du lictor) à cette époque où tous les italiens, enfants et adolescents (et même les autres) étaient encadrés dans des organisations d’Etat.

L’un des projets sur lesquels Surace senior devait travailler était d’enseigner le JuJitsu aux instructeurs de gymnastique qui à leur tour devaient l’enseigner aux jeunes gens. il s’agissait d’un projet extrêmement secret, et dans ce but le gouvernement japonais avait envoyé deux experts, ishiguro et Matakatsu, avec la tâche d’enseigner au père du monsieur qui se trouvait en face de moi.

Malheureusement ce projet avait été interrompu par la guerre, et Surace senior avait dû partir au front dès qu’il avait achevé sa préparation. La collaboration avec l’un des deux Japonais n’était pourtant pas terminée, et tout de suite après la guerre avait continué pendant des années, avec le Japonais qui n’avait pas envie de rentrer dans un Japon battu, invité des Surace en Italie.

La méthode enseignée tirait directement son nom de la super-puissante organisation impériale pour les arts martiaux, qui à l’époque Meiji et ensuite Showa regroupait toutes les plus importantes écoles martiales japonaises; il s’agissait d’une méthode mise au point par les grands experts de plusieurs styles de JuJitsu, à savoir les écoles Yoshin, Shiten, Kyushin, Miura, Takenouchi, Fusen, Kodokan, Sekiguchi, Sosui Shito et, dans une mesure plus limitée, Daito et Kito.

Ce système, peu connu même au Japon, part d’une approche différente de celle habituelle, puisqu’il n’enseigne pas tout simplement des techniques, mais aussi les principes dont ces techniques découlent; le résultat est une efficacité extrême même si les techniques n’ont pas l’aspect élégant de celles d’autres styles.

Une autre conséquence est que l’apprentissage devient beaucoup plus rapide, si bien que n’importe qui est en mesure de se défendre après quelques mois d’enseignement, grâce à une version peut-être un peu grossière mais efficace de cette méthode.

A ce que m’a dit maître Surace, ce système n’est plus en usage, car les experts japonais décidèrent de suspendre son enseignement après la fermeture forcée du Butokukai de la part des Américains.

Certaines choses en ont été changées, par exemple la tenue d’entraînement, qui aujourd’hui se rapproche de celle normalement en usage dans les différents arts martiaux japonais, avec maître Surace qui parfois porte le pantalon noir des vieux pratiquants de JuJitsu. Tandis que dans les années trente on pratiquait ce style en costumes occidentaux, selon l’usage de l’époque et pour souligner qu’il s’agissait d’une méthode «moderne», même si provenant de la tradition la plus pure.

D’autres choses sont restées inchangées: par exemple la pratique a lieu, même à présent, sur un sol dur pour un plus grand réalisme, et les chutes son absorbées en frappant le sol avec une partie précise de la main.

En venant à l’histoire présente, c’est Surace père qui, avant de mourir, estimant que les temps avaient changés et étaient peut-être plus mûrs, exhorta son fils à rendre public cet art jusque là pratiqué secrètement: secret qui toutefois n’a pas été révélé tout à fait, puisque certaines techniques sont toujours gardées comme un secret par l’actuel chef d’école (Surace fils), qui peut-être les révélera un jour à ses élèves les plus avancés.

A la base de l’apprentissage du Dai Nihon Butokukai Ju Jitsu il y a les «déplacements polyvalents», qui permettent aux pratiquants de se mettre à l’abri de n’importe quel attaque, entrer dans la garde de l’adversaire et utiliser l’inertie de celui-ci. Ce système passif est intégré, si nécessaire, par ce qu’on appelle, avec un euphémisme intelligent, «défense préventive».

Contre mes habitudes, un banal inconvénient m’a empêché de me rendre compte personnellement de ce système. De ce qui précède pourtant on comprend que ce type d’entraînement est extrêmement réaliste, avec des combats libres qui ressemblent aux «randori» de Judo, où les combattants essayent d’avoir le dessus par des attaques et des défenses extrêmement réelles.

En cas de difficultés, les pratiquants exécutent des sutemi grâce auxquels ils projettent ou traînent au sol l’adversaire pour aussitôt l’achever: ce qui impressionne dans ces techniques est leur gradualité, qui permet de neutraliser tout simplement l’adversaire ou bien de doser la riposte par rapport à la violence de l’attaque.

Le combat se poursuit aussi au sol, selon un principe omniprésent dans les styles japonais: tandis que l’action d’attaque préférée semble être une combinaison d’attaque de pied et de main renversée (ura mawashi ) avec rotation sagittale du corps.

Les cours sont fréquentés à la fois par des débutants et des experts d’autres arts martiaux, par exemple le tai chi, qui trouvent dans cette pratique un complément intéressant qui les aides même à comprendre des points particuliers de leur discipline.

Pendant ses explications maître Surace, tout en étant très simple et direct, fait des allusions qui démontrent une connaissance à la fois subtile et profonde du panorama martial tout entier, traditionnel et non, comme il convient à l’épigone d’un style qui se veut voué avant tout à l’efficacité.

L’école du JuJitsu Butokukai a désormais bougé du souterrain de l’église et est en train de se répandre dans toute la France, notamment dans les Universités, grâce aussi à des assistants très valables de maître Surace, tels Nicourt et Grillot, vainqueurs ex-æquo de la coupe du monde de JuJitsu 1994 pour les combats.

Le prochain pas sera l’Europe et peut-être nous pourrons voir bientôt le JuJitsu Butokukai dans notre pays, où il a fait ses premiers pas il y a pas mal d’années.

Claudio Regoli

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Web www.surace-jujitsu.fr